
Le licenciement pour insuffisance professionnelle, et non pour faute, d’une directrice régionale en raison de « son style de management directif avec un leadership autoritaire » à l’origine pour un nombre important de ses collaborateurs de troubles liés aux risques psychosociaux, est fondé sur une cause réelle et sérieuse. C’est ce que retient la Cour de cassation dans un arrêt du 2 juin 2017.
Le comportement irrespectueux, agressif, méprisant, voire humiliant d’un responsable envers ses subordonnés constitue une faute justifiant un licenciement disciplinaire. Toutefois, si l’incapacité du salarié à exercer ses fonctions de manière satisfaisante est liée à un manque de compétence, et non à une faute, l’intéressé peut être licencié pour insuffisance professionnelle. C’est ce que retient la Cour de cassation dans un arrêt du 2 juin 2017 concernant une cadre licenciée du fait de son comportement managérial à l’origine de la souffrance au travail de ses subordonnés.
La lettre de licenciement invoque de nombreux griefs
La directrice régionale Normandie d’une société pharmaceutique est licenciée pour insuffisance professionnelle. La lettre de licenciement invoque à son encontre « un comportement à l’origine de ‘manifestations de troubles liés aux risques psychosociaux pour un nombre important de collaborateurs de l’équipe’, un style de management directif avec un leadership autoritaire, un manque de cohérence et d’honnêteté ». Il lui est également reproché « une volonté de démotiver les équipes, un manque de respect de la personne, un langage insultant et dégradant, et une mauvaise communication avec son équipe dévalorisante et dénigrante ».
Le véritable motif du licenciement serait disciplinaire
La salariée conteste son licenciement. Elle soutient qu’il a en réalité un motif disciplinaire. Elle se fonde sur le contenu de la lettre de licenciement dans laquelle son employeur lui reproche un ensemble de fautes. Son licenciement pour un motif non disciplinaire, l’insuffisance professionnelle, est donc sans cause réelle et sérieuse.
La cour d’appel ne retient pas ces arguments. Elle relève les reproches figurant dans la lettre de licenciement, ainsi que le fait que plusieurs salariés de l’équipe de la directrice régionale ont saisi la société pour dénoncer ses méthodes de management, notamment l’usage de propos ou courriels insultants les traitant de « pauvres connes ». Ils constatent que la directrice commerciale avoue « quelques maladresses » dont un horoscope satirique, que les juges d’appel estiment « dévalorisant ». Pour la cour d’appel, il est ainsi démontré que ce sont bien les insuffisances professionnelles de la directrice dans son management qui sont le motif véritable de son licenciement.
La directrice se pourvoit en cassation. Elle fait valoir que, la cour d’appel ayant caractérisé l’existence de manquements de nature disciplinaire dans la lettre de licenciement, les juges ne pouvaient retenir que ces faits relevaient de la qualification d’insuffisance professionnelle. Autrement dit, l’employeur ayant invoqué des fautes disciplinaires dans la lettre de licenciement, les juges auraient dû se prononcer sur leur gravité. En revanche, ils ne pouvaient considérer que le licenciement non disciplinaire pour insuffisance professionnelle était justifié.
l’Insuffisance managériale non fautive est retenue
La Cour de cassation rejette son pourvoi. Les magistrats de la chambre sociale considèrent que la cour d’appel, sans méconnaître les termes de la lettre de licenciement, a pu retenir que les griefs d’insuffisance managériale invoqués dans la lettre relevaient d’une insuffisance professionnelle non fautive.
Cass. soc., 2 juin 2017,